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Et si l’on parlait géopolitique à la télé !

Le débat n’était pas tranché. Les parties prenantes faisaient même preuve de modération parfois déroutante. Pourtant, opposition et pouvoir y étaient bien représentés.

Un débat à sens unique

Deux intervenants semblent bien maitriser les sujets traités : le ministre des affaires économiques et de la promotion des secteurs productifs, mr Kan Mamadou Ousmane et Mr Mohamed Yahya Ould Horma, vice-président de l’UPR (Union pour la république).

Pour le premier, c’est normal qu’il soit au fait des dossiers relevant de son département. Mais à sa bonne connaissance des questions abordées, s’ajoute son aisance verbale et un sens de synthèse qui apportent une touche, personnelle et professionnelle, que pas mal d’orateurs et d’hommes politiques devraient lui envier. 

 Ould Horma, lui, n’est pas en reste. Sa méthodologie est efficace, mais légèrement différente. Débatteur aguerri, il était tout aussi éloquent, et poussait plus profondément l’analyse et l’explication, comme si les deux hommes s’étaient repartis les tâches. Il ne laissait rien passer. Même pas les « taches de peau de panthère » ![i]

Plutôt didactique, son approche était on ne peut plus claire, quand il expliqua la vision de son camp politique. Il l’a développée si bien que l’on pourrait la résumer, sans risque d’erreur, en deux points qui relèvent d’une grande capacité d’analyse politque se traduisant par un discours bien huilé :

l’instauration d’un climat politique apaisé ;l’amélioration du climat des affaires.

L’aisance des deux hommes, appartenant au camp du pouvoir, et leur capacité de persuasion vous donnent l’impression que le débat est à sens unique.

Cependant, un point fondamental aurait mérité plus d’intérêt et de développement de leur part, comme du côté de leurs compagnons sur le plateau de la chaine Elmouritaniya. Il s’agit du contexte sécuritaire régional et ses défis.

J’imagine que, dans l’esprit du vice-président du parti au pouvoir, comme dans l’esprit du ministre, la sécurité est implicitement et automatiquement incluse dans les deux axes principaux évoqués précédemment. Leurs casquettes politiques les empêchent certainement de s’y étaler trop longuement, comme il s’agit de domaines hautement sensibles sur le plan diplomatique. Ce qui est tout à fait raisonnable. Par contre, leurs compagnons sur le plateau de télévision ne devraient normalement pas être soumis au même degré d’obligation de réserve.

Par ailleurs, au-delà cet aspect plus ou moins contraignant pour les uns ou pour les autres, tous savent que le contexte géopolitique, régional et international, incite actuellement à accorder davantage d’attention aux défis sécuritaires, comme axe central structurant dans toute vision stratégique nationale. D’ailleurs Mr Lo Gourmo et l’ambassadeur Bilal Ould Werzeg en ont parlé, chacun, brièvement. Mais c’était insuffisant.
Des questions complexes en suspens: géopolitiques et géostratégiques …

Le retrait des forces américaines de l’Afghanistan risque d’avoir de graves conséquences en matière de lutte contre le terrorisme : les Talibans semblent bien partis pour prendre le pouvoir. Continueront-ils à « pactiser » avec le « djihadisme » international comme ils avaient fait auparavant avec Al Qaida de Ben Laden, et refaire ainsi de leur pays une base arrière pour l’extrémisme violent et le terrorisme qui se déploient à travers la planête sous la bannière de l’Islam ? Ou bien, au contraire, chercheront-ils à construire un Etat « islamique » à même de composer avec la communauté internationale, comme cela s’observe dans d’autres régions du monde : en Turquie, en Arabie Saoudite et ailleurs ?

Quels impacts aura leur victoire, qui semble inéluctable, sur les autres groupes et mouvements violents que l’on qualifie « d’islamistes » ou de « djihadistes » ?

Plus proche de nous, dans la région sahélienne, un autre retrait de forces militaires occidentales est en train d’être opéré par la France au Mali. Bien que l’on ne sait pas exactement ses contours précis, ni ses modalités pratiques, ce redéploiement militaire français aura inévitablement des répercussions sur notre environnement géostratégique régional immédiat.  Quelles seront ses conséquences pour notre pays, notamment en termes de lutte contre le terrorisme, l’extrémisme violent et la criminalité transnationale ?

Au plan géopolitique, un dialogue est envisageable entre les autorités maliennes et les « djihadistes » locaux, bien que la France s’y oppose catégoriquement. Qu’il ait lieu ou pas, le sujet suscite pas mal d’interrogations et de controverses. 

En approuvant le dialogue entre Américains et Talibans, les Français n’appliquent-ils une politique de « deux poids, deux mesures », quand ils refusent le dialogue avec les djihadistes maliens ? Dans ce cas, ces derniers ne risquent-ils pas d’exploiter à leur profit les dissonances entre la position de la France avec l’attitude de ses alliés maliens et sahéliens ?

Ces questions, comme beaucoup d’autres, engendrent autant d’incertitudes, tant militaires que politiques. Comme la nature a horreur du vide, il est à craindre, qu’à défaut d’y répondre correctement, des forces criminelles en tirent profit.

Pourquoi ne pas organiser des débats télévisés à ce sujet et sur les questions afférentes ?

El Boukhary Mohamed Mouemel

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